Compte-rendu Festival Fantastique de Strasbourg 2016
Publié le 12 Août 2017
Je sais, on est en 2017 ! Gros décalage, donc, pour ce compte rendu du festival fantastique de Strasbourg qui a eu lieu du 16 au 25 septembre 2016 mais cela permet de se plonger ou se replonger dans cette période heureuse ou les beaux jours étaient encore parfois présents et ou les bières coulaient à flot au bar du village fantastique, place centrale du festival ou on pouvait acheter des places, récupérer les accréditations, acheter des t-shirts, des posters et se sustenter avant d’enchainer les films. Une organisation réussie, une ambiance conviviale, des salles de projo variées et accueillantes et même si je n’ai pas réussi à assister à toutes les séances que je voulais (tant pis pour la cérémonie d’ouverture et son « Swiss Army Man » parait-il excellent ainsi que pour « 31 », le nouveau Rob Zombie), les films que j’ai pu voir étaient d’un niveau global satisfaisant et plutôt hétéroclites.
Commençons ce petit tour d’horizon de ce que j’ai pu voir avec le film le plus réussi : « The Love Witch » et son look sixties/seventies parfaitement intégré à une intrigue contemporaine (donnant au film une ambiance anachronique plaisante). Un mix réussi de romance, de violence, de perversion et d’humour aux éléments parfaitement dosés, aux dialogues percutants et justes sans oublier un casting aux petits oignons pour cette histoire originale et barrée de sorcière prête à tous les tours pour obtenir l’amour suprême. Autre réussite, « Détour » du constamment excellent Christopher Smith raconte l’histoire d’un ado qui planifie de tuer son beau-père avec l’aide d’un voyou croisé dans un bar. Thriller au montage malin, dopé aux split screens, le film brouille les pistes entre imaginaire et réalité apportant ainsi à une intrigue pourtant classique un intérêt et un suspense soutenu. Toujours dans les bonnes surprises, « Another Evil », petite production qui ne paie pas de mine et qui arrive à tenir en haleine grâce à une idée efficace (le prêtre qui vient combattre l’esprit d’une maison se voulant hantée se trouve être quelque peu squatteur, encombrant et finalement plus dangereux que le fantôme qu’il est venu chasser) et des comédiens souvent drôles. Dans les films au résultat plus mitigé, commençons par « The open » dans lequel, après une apocalypse, un homme et une femme se retrouvent à devoir se préparer à une compétition de tennis sans filets, sans balle et sans corde sur les raquettes… Si le pitch est original et si le film ne manque pas de qualités autant visuelles que scénaristiques, il pêche par un sérieux manque d’émotions et d’enjeu tant au niveau des personnages que sur le plan « sportif » empêchant le spectateur de s’émouvoir de la relation entre les deux héros ou du résultat du match. Autre semi-réussite, « Ballad in Blood » de Ruggero « Cannibal Holocaust » Deodato qui remplit son contrat au niveau sang, ambiance malsaine, cul et divertissement mais qui ne touchera pas les hauteurs du genre faute à un scénario plaisant mais peu surprenant et à des pistes obscures qui auraient méritées d’être exploitées. « I’m not a serial killer » quant à lui, pose une ambiance réussie digne des frères Coen avec son climat hivernal, convint grâce à sa musique à la Carpenter et un excellent final mais pêche par un rythme trop lent, un trop plein d’idées pas toujours bien exploitées et un héros trop conscient d’être un sociopathe pour être crédible à cent pour cent. Malgré tout, un film généreux et bien foutu dans lequel on retrouve notre Christopher Lloyd adoré et ça, ça fait plaisir ! « Blair Witch », la suite du « Projet Blair Witch » réalisé par Adam Wingard à qui l’on doit le très bon « You’re Next » est, pour un non partisan du premier opus comme moi, une plutôt bonne surprise grâce à une deuxième partie efficace et enlevée. La première moitié est quant à elle dramatiquement désagréable avec ses repompes du premier opus et ses jump scares foireux. Petite déception pour « Yoga Hosers », le nouveau Kevin Smith à qui l’on doit pourtant des comédies et des films de genre ultra réussis («Clerks » et « Tusk » pour ne citer qu’eux) et qui s’emmêle les pinceaux dans ce mélange des genres (comédie+fantastique) au pitch délirant (des hommes saucisses nazis attaquent une supérette) mais au je-m’en-foutisme exaspérant. Gags redondants devenant lourdingues, scénario bâclé, personnages agaçants. Etonnant et donc décevant de la part d’un mec habituellement aussi précis et consciencieux que M. Smith. Allez, un faux pas, ça arrive, on lui pardonne !
Dans les grands classiques du cinéma, cela a été un grand plaisir de revoir « Les Dents de la Mer » sur grand écran et aux bains municipaux ! Expérience originale qui a permis aux spectateurs de voir le film depuis une bouée au milieu de l’eau. Même si l’acoustique en a pâtit forcement, l’immersion et le fun étaient bien présents.
Autre grand moment, la diffusion de « Maniac » précédé d’une longue masterclass de son réalisateur William Lustig qui a étalé avec grand plaisir des anecdotes croustillantes parfois drôles (comment il a obtenu son budget et l’idée de « Maniac Cop »), toujours passionnantes (la création de certaines cascades) et aussi émouvantes (les addictions et la folie du regretté Joe Spinnel, héros de « Maniac »). Un grand moment grâce à la loquacité et le rythme du réalisateur faisant passer ces deux heures d’échange à vitesse grand V. N’ayant pu participer à la masterclass du Maître Dario Argento, je ne pourrais donc pas vous en dire un mot mais j’imagine que ça devait être aussi passionnant que celle de Bill Lustig.
L’important dans un festival, c’est la sélection de films mais un festival ne serait pas un festival sans les animations et les rencontres ! Cette année, la zombie walk a été remplacée, pour cause de plan vigipirate, par un apéro zombie. Fini de déambuler dans les rues, les zombies étaient, cette année, parqués dans un enclos grillagé et surveillé. Malgré cela, l’après-midi, sous un joli soleil, fût agréable grâce à des maquillages excellents, des concerts et des stands de bières, de pâtes et de hot dogs.
Niveau rencontres, ce fut un réel plaisir de partager quelques séances matinales avec William Lustig et de pouvoir échanger avec lui. Ruggero Deodato fut lui aussi de très bonne compagnie. Très inquiet sur ce qu’avait pu penser les personnes présentes lors de la projo presse de son « Ballad in Blood », il demandait l’avis à toutes les personnes qu’il croisait et semblait contrarié lorsque Christophe Lemaire de « Mad Movies » lui donna son ressenti mitigé. Pas rancunier, il ne fut pas avare en anecdotes sur le tournage de son métrage et se fut un plaisir de tester les casques de réalité virtuelle avec lui.
Mon séjour fut aussi égayé par l’amicalité, les cafés, les verres et les avis partagés avec Christophe Lemaire, Gilles Penso (L’écran Fantastique mais aussi réalisateur du film « Creatures Designers »), Pascal Parole, Julien Ditsch et Lucie Mottier. Merci à eux pour leur sympathie et pour les passionnantes conversations.
A une prochaine pour ce formidable festival qu’est le FEFFS !
Sylvain Gib